1/ La musique pour vous c’est :
Des assemblages, des compositions de sons qui procurent et se fixent sur des émotions.
2/ À partir de quel âge a-t-elle joué un rôle important dans votre vie ?
A partir de mes 14 ans, quand j’ai commencé à faire des fanzines. Ce n’était plus seulement un goût, une passion, mais une manière d’être au monde, en articulation avec lui. `
3/ Quel est le premier groupe (morceau/genre/personne…) qui vous a interpellé ?
“Pierre et le loup” de Prokofiev. Je le trouve encore magique.
4/ Quel était l’avis de vos parents sur cette musique ? celui de vos amis(es) ? de vos camarades ?
Je crois que mes petits camarades de maternelle, émerveillés, avaient la bouche aussi grande ouverte que moi. Mes parents n’étaient pas là.
5/ Durant votre enfance/adolescence ressentiez vous de la discrimination envers les gens qui écoutaient d’autre musique que la musique que la musique populaire ? envers ceux qui n’écoutaient pas de musique ?
La musique est à la fois une expérience intime, émotionnelle, et un marqueur culturel. Elle dit en paroles, en sons, en composition ce qu’on ne saurait dire, épeler soi-même. Elles permettent à des communautés de se constituer autour de références communes, de permettre a des personnes de se rencontrer autour d’un possible partage de sensibilité et pour certains, par la suite, de faire de ce tronc d’entente des projets, groupes comme fanzines mais aussi des mouvements, des scènes, et finalement de changer, même modestement, le cours de l’histoire à leur tour, en mettant en circulation de nouvelles musiques, de nouveaux objets, de nouveaux gestes… C’est le propre des œuvres d’art et de l’esprit – ce qui fait, peut-être, notre mouvement de fond.
Petite comme grande, je n’ai jamais réussi à trouver mon “musée des musiques imaginaires” exactement identique chez une autre personne. Il y a toujours des choses qui échappent, qui me sont propres, car l’autre personne n’aura jamais exactement là même carte musicale que moi. Elle est tellement liée à l’histoire de chacun, ses contacts premiers avec la musique, les émotions qui s’y raccrochent ! Ce que j’aime beaucoup, en revanche, c’est la façon dont l’amour, l’amitié, l’admiration que l’on porte à des personnes nous pousse à nous mettre en empathie avec son monde, a explorer sa carte, son musée justement. J’ai tellement découvert de musiques de cette façon ! Quelque chose se joue, dans ces moments, dans la confiance portée à la personne dans ses goûts, à la possible similarité, parenté, d’émotions vécues. On a envie de lire tout ce que l’autre lit, d’écouter tout ce qu’il écoute, se fondre avec ce qui le constitue. Ça nous fait aller à tellement de nouveaux endroits ! Et c’est comme ça que la musique, comme l’art, la littérature, a fait principalement, au fil des années, réseau en moi.
C’est une aventure intérieure, intime. Que je n’ai jamais mis en tension, au dessus ou au dessous, avec ce qui m’entoure, comme si c’était une autre strate, un autre plateau du réel, qui échappe à la compétition.
6/ Que ressentez-vous quand vous écoutez de la musique (généralement) ?
7/ Écoutez-vous la musique que vous écoutiez jeune ? si oui que ressentez vous ?
Les états sont si variés ! Tout dépend, surtout, de mon empathie avec ce que j’écoute, la façon dont je greffe à l’écoute des petits bouts de moi, des émotions, des souvenirs, des états, si je pense à quelqu’un ou pas, si je suis dans un état émotionnellement mouvant, si j’ai envie de danser… Les souvenirs des premières écoutes, aussi, remonte souvent : c’est comme si des bouts de mon histoire avaient été fixés par le fait d’écouter de la musique en même temps, et qui auraient sûrement glissé dans le néant autrement.
8/ Que ressentez-vous quand vous écoutez la musique que vous aimez ?
D’être chez moi !
Réponses : Marie-Pierre Bonniol, septembre 2014