Le charme de l’étrange

“Le charme de l’étrange peut être ressenti aussi bien, par exemple, en regardant un lointain bleu qu’en regardant un paysage qui apparaîtrait dans le ciel. Il est permis de douter de l’obligation de ressentir un sentiment “déterminé” par ce que nous regardons. Une chose très familière est regardée parfois avec un sentiment de l’étrange et nous pouvons avoir un sentiment familier pour des choses dites mystérieuses; dans les deux possibilités se trouvent réunis soit un sentiment de l’étrange, la chose familière et nous-mêmes. Cela n’implique guère la “détermination” de nos sentiments ni que le peintre puisse décider quel sentiment un tableau devrait provoquer. (…) Le sentiment que nous éprouvons pendant que nous regardons un tableau n’est pas à distinguer du tableau ni de nous-mêmes. Le sentiment, le tableau et nous-mêmes sommes réunis en notre mystère.”

  • Extrait de René Magritte, Ecrits complets, Flammarion 2009 cité dans Magritte, ses sources, ses thèmes, son héritage, TTM Editions/Beaux Arts Editions, 2009